Un très bon bistrot
"Il faut cultiver notre jardin" soulignait Candide en excipit du conte philosophique de Voltaire. Si la citation est peut-être inconnue des deux chef(fe)s qui président aux destinées de ce bistrot, l'esprit de leur carte est en phase avec celle-ci: soit un quatre mains "façon jardin", le leur, racines savoyardes pour Tiphaine (école Ducasse) et focales sud-ouest pour Romain (parcours davantage éclectique), tendance basco-béarnaise. Lesquels titillent le régionalisme culinaire quelque peu en berne dans la capitale, parfois réduit à sa caricature, en combinaisons habiles et en mises en œuvre jamais sottes: croquetas à la raclette et crème de jambon blanc, lentilles aux diots fumés, trompettes et jaune d'œuf confit, pot-au-feu de gnocchis de courge à l'Ossau-Iraty, pintade farcie (beau travail), châtaignes, gratin de pommes de terre au topinambours fumés au pin et reblochon, risotto de crozets au beaufort et txistorra (sorte de saucisse euzkadienne), poire rôtie, confiture de lait et pastis landais. D'autant que les assiettes ne déméritent pas quant à la générosité (dans notre cas, en versant alpin) : foisonnant diptyque eau douce-eau de mer sous la forme de friture de percherots du Lac du Bourget associés à des éperlans, à trempouiller dans une sauce tartare respectueuse des poissons; double filet d'omble-chevalier également lacustre bousculé d'un ragoût de haricots tarbais haut en saveurs; en fin, un cheesecake au génépi le Pompon, agrumes et chantilly, plaisant mais qui le serait encore plus avec un verre de liqueur en sus pour faire grimper aux sommets. Séduisante formule brunch le dimanche et petite gamme de produits à emporter (pastis, crozets savoyards, polenta basque, etc.).