Un bon restaurant
Dans ce passage des Panoramas, où tout passe et tout lasse, le Caffé Stern fait figure d'institution, dans le meilleur sens du terme. Depuis 2014, le magnifique décor préservé par Philippe Starck abrite d'agapes discrètes, tantôt simples comme une bolognaise, tantôt beaucoup, beaucoup plus sophistiquées. Le chef, Massimiliano Alajmo, aime rassurer, par exemple avec un tiramisu et quelques autres standards servis sans chichi. Il aime aussi surprendre. Après une journée agitée, on choisira des paccheri aux champignons, foie de veau "alla veneziana" et polenta frite et sorbet de mandarine, dans les règles de l'art et un zeste d'imagination. Un autre soir, il faudra s'abandonner et, par exemple, oser une pizza à la vapeur, comme un sponge cake couronné d'un crémeux de homard et de grains de caviar. La cuisine est une chose sérieuse, en Italie du Nord tout particulièrement, mais faut-il se prendre au sérieux ? Après un risotto aux lièvre et truffe blanche, craquant et fondant à la fois, il est bon de se laisser embarquer vers une glace à l'orge torréfié, pour tout oublier. A chaque étape, si l'on veut bien, la sommelière attentionnée propose un vin, ou plutôt le vin, celui qu'on aurait choisi dans la vaste carte si l'on en savait autant qu'elle. Dans les verres, soufflés pour la famille Alajmo, du sublime et du malin, selon la bourse et l'humeur. Pour ce voyage d'Italie, en toute simplicité, les tarifs sont ceux d'une grande table -n'est-ce pas le prix raisonnable de l'éternité ?