Un des meilleurs bistrots de la ville
Charcutière! Il est rare que ce métier se décline au féminin, si ce n'est pour qualifier l'épouse d'un roi du boudin ou d'un empereur du pâté de tête, rivée à la caisse comme attentive vigile. Excepté chez Lissit, petit boyau (les places y sont chères) heureusement enrichi de guéridons miraculeux en terrasse estivale. Y officie une fêlée du jambon de Bourgogne, une fée du boyau, Claire Grumellon, auparavant au Vaillant dans le Xème, que nous avions manqué. On a perdu un temps précieux, raison de plus de s'astiquer le palais de ses compositions pétries, d'évidence, de personnalité, voire de provoc'. Ici, enjambez d'abord velouté froid de tomate et tartare de thon blanc de Saint-de-Luz; sans aucun doute vertueux, on n'a rien contre mais on n'est pas venu pour cela. Davantage pour le pâté en croûte replet, de taille imposante (il prend la place d'un plat) et farci de concupiscent cochon, plus encore de foie gras et gésiers, une rareté, et d'une brune et profonde gelée, œuvre de réduction de bouillon d'os et autres. Puissant. Puis on frise le nirvana avec une tatin de poire et boudin noir, reposant sur une pâte brisée, phénoménale d'harmonie, au goût de (presque) trop peu! La fête n'est pas finie, on s'obstine en attaquant une saucisse de cochon et moules (vous avez bien lu!) discrètement iodée comme sa purée marinière. L'hallali? Une diabolique saucisse de cou de caille, entièrement désossée puis farcie dans sa peau, accompagnée de gribiche,et servie avec deux têtes de volatile posées dans l'assiette. Du gore comme on n'en avait jamais vu, une vraie poilade que ne partagera pas forcément votre commensal(e). Gilles Dupuis