Un très bon bistrot
A défaut de se lamenter sur l'invasion de la street food et du recul du bistrot de quartier (quoique...), l'Orillon bar, en plein Chinatown bellevillois, valeur sûre, rassure. Troquet d'angle comme il se doit, attaque à 8 heures du mat' et non-stop parfois jusqu'à point d'heure (légalement, deux heures du mat'). Tout y est, croissant, jambon-beurre, planches charcut'-fromentons, l'Equipe et Libé à dispo, etc. Manquent juste la piste de 421 sur le zinc-comptoir mouluré mais pas l'envie de prendre racine, d'interneter, de partager un godet, et la mauvaise blague serait de vous faire dégager parce que vous voulez y faire souche. Aucun risque avec la nouvelle équipe qui, après une décennie sous la houlette de Thomas Chevrier au service de cette cambuse amicale, vient de prendre le relais, ne changeant rien à une formule qui gagne, surtout au déjeuner-semaine. Au sein d'une petite salle (désormais ripolinée de blanc) où on partage tables, conversations, verres de contact et plus si affinités, l'ardoise du jour se décline façon menu ouvrier (22 euros) et taquine même le produit noble avec talent (ce jour-là, rognon de veau et thon cru mariné). À tel point qu'on se demande même pourquoi on devrait se coltiner courses et fourneau, quand on vous livre sur un plateau une vraie cuisine, habile et phosphorée, qui certes reste un peu modeste en quantité, mais réjouit les cœurs. Au dîner, on change de braquet, avec poitrine de cochon fumé et compote de pommes aux noisettes, ragoût d'agneau, risotto d'épeautre et crème de champignons... (assiettes de 8 à 30 euros pour une pièce de viande à partager) et toujours dans cette atmosphère à la sans-façon.Gilles Dupuis